C'est un arbrisseau cultivé dans la plus grande partie de notre Flore et qui est souvent subspontané dans les haies ou au bord des bois, surtout dans la partie méridionale de la France.
La plante grimpe et se soutient par des vrilles qui s'attachent aux autres arbrisseaux, aux branches des arbres ou aux supports, puis s'enroulent en rapprochant l'arbrisseau du support, et persistent ensuite pendant plusieurs années.
Les tiges sont de longueur variable, et peuvent atteindre une longueur considérable lorsque la Vigne croît en grimpant sur des arbres. même jusqu'au sommet des futaies les plus élevées. Les fleurs se montrent ordinairement en juin ; les fruits sont mûrs à la fin de l'été ou en automne. Les feuilles sont longuement pétiolées et leur limbe, à découpures très variables, le plus souvent à 5 lobes principaux, ont leurs nervures disposées en éventail ; le limbe est, à la base, en forme de cœur renversé. Les fleurs, verdâtres, sont relativement très petites, odorantes, et disposées en une sorte de grappe composée à ramifications assez complexes.
Les fruits mûrs, charnus, arrondis ou ovales sont recouverts d'une fine poussière glauque ; ils ont une couleur variable, le plus ordinairement blanche, jaune, violette ou noire ; c'est de cette dernière couleur que sont habituellement les fruits des pieds de Vigne subspontanés, presque retournés à l'état sauvage ; en ce cas, les fruits sont relativement petits et peu sucrés.
La tige de cet arbrisseau n'est pas simple dans son développement ; elle est formée par des portions successives de rameaux placées bout à bout ; en effet, lorsqu'on suit le développement, on voit que chaque entre-nœud produit une feuille, et que le bourgeon terminal, formant soit une grappe de fleurs, soit une vrille, devient latéral ; c'est le rameau né à l'aisselle de la feuille qui prédomine dans l'évolution et produit un rameau vigoureux qui semble continuer l'entre-nœud précédent. L'écorce est grise et se détache irrégulièrement par de larges filaments plus ou moins déchiquetés. (On a décrit de nombreuses anomalies des feuilles chez cette espèce. On y trouve quelquefois des fleurs à 3 ou 4 pétales et 3 ou 4 étamines ou à 5 étamines transformées en pétales ; quelquefois les fleurs et surtout leurs étamines se sont accrues d'une façon démesurée. Beaucoup plus rarement, les fruits charnus se sont transformés en fruits secs s'ouvrant par deux valves. Il y a parfois des plantules à 3 cotylédons ou à cotylédons divisés).
Noms vulgaires. En français : Vigne, Pampre, Lambrusque. En ancien français ! Lambrunche, Viorgne. En allemand : Rebe, Weinstock, Weinrebe. En flamand : Wijnstok, Wijngaert, Druive-laar, Druivenboom. En italien : Vite, Lambrusca, Labrusca, Zampino, Vite-salvatica, Abrostina. En anglais : Vine.
Usages et propriétés. La Vigne, cultivée de temps immémorial dans l'Ancien Continent, a été introduite dans toutes les contrées tempérées, par exemple aux Etats-Unis, au Cap de Bonne-Espérance et en Australie. En France, la Vigne est plus ou moins cultivée partout ; mais, en pleine terre, elle ne mûrit pas ses fruits sur le littoral de la Manche ni dans une assez grande étendue à l'intérieur des terres à partir de ce littoral. Les plaines qui bordent la Méditerranée et le Tessin en Suisse sont les régions de notre Flore où la Vigne donne des fruits en plus grande abondance ; toutefois les vignobles de la Bourgogne, de la Gironde et de la Champagne sont les plus estimés. Les raisins peuvent être consommés directement, et même la Vigne est parfois cultivée uniquement dans ce but (Chasselas de Fontainebleau par exemple) ; on consomme aussi les fruits desséchés (raisins de Corinthe, etc.) ; toutefois, le plus souvent, les fruits servent à la fabrication du vin, le sucre qu'ils renferment étant dédoublé par la fermentation alcoolique en alcool et en gaz carbonique, grâce a la présence naturelle du ferment « levure de vin » qui se trouve à la surface des grains de raisin. Certaines variétés ont des fruits blancs ou d'un blanc jaunâtre qu'on appelle des « raisins blancs » et qui ne peuvent servir qu'à la fabrication du vin blanc ; d'autres variétés portent des raisins d'un rouge noir qui sert à faire du vin rouge ; mais la matière colorante se trouvant localisée dans l'enveloppe des fruits, si on exprime le jus des raisins noirs à l'aide d'un pressoir, on obtient du vin blanc ; d'autres variétés encore ont des grains dont le suc est coloré en rouge et ne peuvent servir qu'à fabriquer du vin rouge.
Pour conserver les variétés ou « cépages » de Vigne, on les a multipliés par boutures et par marcottes, car, en général, leurs caractères ne se transmettent pas par semis. Or, en France, en 1868, des plants de Vigne importés d'Amérique, ont introduit en Europe un insecte de l'ordre des Hémiptères, le Phylloxéra vastatrix, qui, vivant en parasite sur les racines de la Vigne, amène rapidement la mort des pieds atteints. Le Phylloxéra s'est alors répandu avec rapidité, et tous les vignobles auraient été détruits si l'on n'avait cherché à combattre le fléau. On a remarqué alors que certaines Vignes américaines, telles que les Vitis riparia et Vitis rupestris résistaient au Phylloxéra ; mais ces espèces ont des fruits de qualité très inférieure ; on a alors greffé le Vitis vinifera sur des pieds de ces Vignes américaines : les nouvelles Vignes appartiennent donc aux espèces américaines par leurs racines, ce qui fait qu'elles résistent au Phylloxéra et au Vitis vinifera par leurs tiges aériennes, ce qui leur permet de produire des fruits utilisables.
Par la distillation du vin, on obtient 1' « eau de vie », qui renferme une très forte proportion d'alcool éthylique. On sait qu'on fabrique aussi l'alcool éthylique et le vinaigre à l'aide du vin.
Le bois est d'un grain fin et se conserve indéfiniment ; avec les tiges de Vigne, on fabrique des cannes, connues dans le Midi sous le nom de «védiganes». Les fleurs sont quelquefois visitées par les abeilles qui y récoltent un nectar ordinairement assez peu abondant. On traite certaines maladies d'estomac par des « cures de raisin ». Les vrilles sont quelquefois employées comme astringentes. Le liquide formant les « pleurs de la Vigne », exsudation de la sève qui se produit au printemps, a été utilisé contre les maladies des yeux. Les graines renferment une huile grasse ou « huile de raisin » contenant 10% environ de stéarine et de palmitine et qui a été préconisée contre les diarrhées. Le vin rouge, bouilli avec du persil, employé en lotions ou en compresses, est un excellent remède pour les plaies et les ulcères. Les fruits peuvent contenir 24 % de sucre interverti, très peu de saccharose, divers acides organiques (acide malique, acide vinique, etc.), de la lécithine, des gommes, des pectoses. Toutes les parties de la plante renferment des glucoses, du saccharose, de l'invertine et une oxydase voisine de la laccase. Les cendres, souvent très riches en chaux, contiennent aussi de la soude, de la potasse, des acides phosphorique et sulfurique.
Distribution. La Vigne est cultivée depuis les temps les plus anciens, et on la dit originaire de Géorgie ; mais on rencontre des empreintes de feuilles dans les tufs de l'époque quaternaire et on trouve des pépins de raisin dans les dépôts préhistoriques, d'où il semble probable que cette espèce existait à l'étal naturel, et on trouve des pépins de raisin dans les dépots préhistoriques, au moins dans la partie méridionale de la France. La culture de la Vigne ne dépasse pas, en général, 800 m. d'altitude même à l'exposition au Sud. On trouve cependant des Vignes jusqu'à 950 m. d'altitude dans les Alpes-Maritimes et, exceptionnellement, jusqu'à 1.200 m. dans la vallée de la Durance. A l'état subspontané, la Vigne ne se rencontre qu'aux basses altitudes en Savoie et en Dauphiné. Dans les Alpes méridionales et les Pyrénées-Orientales, on peut la trouver à l'état subspontané jusqu'aux altitudes où sa culture est possible. France : la Vigne ne pouvant mûrir ses fruits que lorsque la température moyenne de l'été est au moins de 18° et périssant lorsque le froid atteint -20°, sa culture pour la production des fruits ne s'étend pas dans le Nord et le Nord-Ouest de la France, à moins que ce soit en treilles, comme plante ornementale ou pour être cultivée en serre. A l'état subspontané, la Vigne se rencontre principalement dans la partie méridionale de la France. Suisse : cultivé ; subspontané surtout dans la Suisse italienne, rarement ailleurs. Belgique : cultivé en grand dans la vallée de la Meuse ; cultivé en treilles dans presque toute la Belgique. Europe et hors d'Europe : cultivé dans les parties les moins froides des contrées tempérées des deux Hémisphères.
Il existe un nombre considérable de races et de variétés cultivées de cette espèce.
Remarque. Le Vitis Labrusca L., connu sous le nom de « Vigne Framboisier », est cultivé par pieds isolés, au milieu des autres Vignes, dans le Tessin. On reconnaît cette espèce à ses feuilles dont le limbe est à peine divisé en 3 lobes et qui est recouvert à sa face inférieure, ainsi que les vrilles, d'un revêtement semé de petits poils gris ou couleur de rouille ; les feuilles sont bordées de dents espacées, terminées chacune par une toute petite pointe courte ; les fruits ont une saveur très spéciale, rappelant un peu le goût de la framboise.
L'Ampelopsis quinquefolia R. et S., bien connu sous le nom de «Vigne-vierge» est très souvent cultive dans les jardins et se trouve parfois à l'état subspontané. On reconnaît cette espèce aux feuilles composées, ordinairement à 5 folioles, aux vrilles munies de sortes de ventouses qui adhèrent aux supports, aux fleurs dont les pétales sont libres entre eux au sommet ; ces fleurs sont très visitées par les abeilles qui y récoltent un nectar abondant. Les fruits sont ovales et d'un noir bleuâtre lorsqu'ils sont mûrs ; ils ont un goût amer et désagréable.